Star Wars : Le fascisme pour les nuls

Avec la saison 2 de Andor, le cœur politique de Star Wars redevient douloureusement visible

La saison 2 d’Andor est arrivée – et elle nous rappelle ce qu’était Star Wars à l’origine : une parabole sombre sur le pouvoir, le contrôle, et le courage de dire non. Tandis que d’autres séries de la franchise s’égarent dans des tempêtes de sabres laser, Andor revient à l’essentiel, à ce que George Lucas voulait vraiment montrer dans ses meilleurs moments : comment l’insécurité mène à la dictature. Et à quoi ressemble une rébellion avant qu’elle ne devienne une légende.


Empire contre Rébellion – L’ADN politique des premiers films

Avant les préquels et les histoires d’enfance, Star Wars (1977) était un western spatial simple, presque archétypal – avec une ligne de front nette : l’Empire d’un côté, la Rébellion de l’autre. Mais avec le deuxième épisode (The Empire Strikes Back, 1980), le tout prenait une dimension politique plus marquée.

L’Empire : froid, technocratique, uniformisé. Une organisation qui couvre la galaxie d’un ordre aveuglant et ne tolère aucune déviation. Les stormtroopers ne font pas que défiler – ils fonctionnent. Ils incarnent le rêve humide de tout système autoritaire : sans visage, sans questions, parfaitement efficace.

Face à eux, la Rébellion : une bande de marginaux, d’exilés, de bricoleurs. Leurs vaisseaux tremblent, leur hiérarchie vacille. Ils ne se battent pas pour la gloire, mais pour survivre. Ils sont les partisans de Leonard Cohen, transposés dans l’espace :

« Quand ils ont franchi la frontière / On m’a conseillé de me rendre / Je ne pouvais pas. »
— Leonard Cohen, The Partisan

Ces rebelles ne cherchent pas à devenir des héros. Ils le deviennent malgré eux – en refusant d’obéir. Et Star Wars n’a jamais été aussi fort que lorsqu’il maintenait cette tension : pas entre le bien et le mal, mais entre l’obéissance et le refus.


Andor – Retour à la critique systémique

Andor va plus loin que les anciens films. Pas de combats épiques dans l’espace, mais des conversations feutrées sur la surveillance. Pas de duels de sabres laser, mais le silence d’une prison stérile. Pas d’Empereur lançant des éclairs, mais une bureaucratie qui brise les individus par pure procédure.

L’image la plus marquante : ce camp de travail sous-marin. Lumière blanche, murs blancs, uniformes blancs – tout semble cliniquement propre, contrôlé, silencieux. Aucune violence apparente, aucun cri, pas une goutte de sang. Juste un processus. Un rouage. Une exigence : fonctionner. Les émotions sont superflues.

Et c’est là qu’Andor montre le vrai visage de l’Empire : ce n’est pas un démon de conte de fées, mais un système de fichiers, d’algorithmes et d’automatismes. Il n’a pas besoin d’idéologie, juste d’habitude. Pas de haine, juste de la routine.


SUV blancs et esthétique du pouvoir

Quand je suis arrêté à un feu rouge – SUV blanc devant, SUV blanc derrière – et que je ressens cette envie irrationnelle de dégainer un sabre laser, je me dis : l’Empire fasciste n’arrive pas dans des chars. Il arrive avec une prise USB-C. Avec une esthétique Apple. Avec la voix rassurante d’un assistant vocal qui connaît ta destination avant même que tu te demandes pourquoi tu as quitté la maison.


Un vieux combat, raconté autrement

La Force, dans Star Wars, est bien plus qu’un champ d’énergie invisible. C’est un symbole du contrôle – sur les technologies, les bureaucraties, les récits qu’une société se raconte. La trilogie originale rendait ce combat visible. Andor le rend sensible – discret, oppressant, présent dans chaque geste du quotidien.

Et c’est là que la série fait mouche : elle montre comment un système autoritaire ne s’impose pas par les bombes, mais par l’efficacité. Comment la soumission peut ressembler à une organisation parfaite – jusqu’à ce qu’il soit trop tard.

Et elle nous rappelle que la révolte ne commence pas en criant. Elle commence en doutant. En posant une question. En refusant de continuer comme si de rien n’était.

Parfois, il suffit de ça pour fissurer l’ombre.
Et laisser passer un peu de lumière.